15/03/2025
Lorsque l’on parle de vinification, il est facile de penser aux étapes ultérieures : fermentation, élevage ou encore mise en bouteille. Mais tout commence dans les vignes, au moment exact où les grappes sont cueillies.
Les raisins récoltés fixent irrévocablement une partie des caractéristiques du vin. Leur maturité détermine les niveaux de sucre, d’acidité et d’arômes, tout comme leur richesse en tanins ou leur équilibre. En biodynamie et en bio, ce moment crucial ne repose pas uniquement sur des aspects scientifiques : il appelle aussi à une compréhension globale de l’environnement et des cycles naturels.
En viticulture conventionnelle, la maturité des raisins est généralement évaluée via des mesures comme :
Ces méthodes restent tout aussi valables dans un contexte biologique ou biodynamique. Cependant, ces dernières ajoutent une réflexion plus large. En bio, les sols vivants et les vignes en bonne santé permettent souvent aux raisins de développer une maturité plus homogène. En biodynamie, l’interprétation des cycles planétaires et lunaires entre également en jeu.
En biodynamie, les phases lunaires influencent énormément la vision des vendanges, tout comme elles impactent d'autres pratiques viticoles. Le calendrier de Maria Thun, référence en la matière, distingue des jours favorables pour manipuler les plantes en fonction de la position de la lune et des constellations.
Par exemple :
Mais attention : le raisin ne va pas attendre la prochaine pleine lune pour atteindre sa maturité parfaite ! Le défi consiste donc à marier ces principes avec des réalités agronomiques et météorologiques.
En viticulture biologique et biodynamique, les sols ne sont pas de simples supports : ce sont de véritables réservoirs de vie et d’énergie. Ils influencent directement la qualité du raisin et sa capacité à mûrir harmonieusement.
Les sols biologiques, enrichis par des composts naturels et peu perturbés par des traitements chimiques, favorisent une alimentation équilibrée des vignes tout au long de l’année. Résultat : les baies arrivent souvent à maturité de manière plus régulière, avec des niveaux d’acidité préservés.
En biodynamie, les préparations spécifiques — comme la fameuse bouse de corne (préparation 500) — visent également à renforcer les interactions entre la plante et son environnement. Cela pourrait expliquer pourquoi, selon plusieurs vignerons, les raisins biodynamiques offrent une maturité plus riche en nuances.
La météo reste toutefois un facteur imprévisible, que l’on cultive bio, en biodynamie ou en conventionnel. Mais ces pratiques imposent souvent des défis supplémentaires.
En viticulture biologique, par exemple, les vignes étant moins protégées par des fongicides chimiques, certaines maladies comme le mildiou ou la pourriture grise peuvent s’installer rapidement si le climat tourne à l’humide. De ce fait, il arrive parfois de récolter légèrement avant la maturité optimale pour éviter que ces maladies ne gâchent la récolte entière.
De manière générale, un bon viticulteur bio ou biodynamique anticipe en observant la météo locale et en ajustant son calendrier en conséquence. Certains utilisent même des outils météorologiques sophistiqués, combinés à leur propre expérience et intuition.
Les définitions techniques de la maturité donnent des bases solides. Mais dans les pratiques bio ou biodynamiques, nombreux sont ceux qui s’appuient aussi sur une observation attentive des grappes, et même sur une dégustation organisée directement dans la vigne.
L’un des rites que j’ai toujours trouvé fascinants en biodynamie est l’échange entre l’équipe de récolte et les responsables des vignes. Certains vignerons réalisent littéralement un “tour de table vignoble”. Ils coupent quelques grappes ici et là, et les dégustent ensemble. C’est en goûtant la pulpe, les peaux et parfois même les pépins qu’ils se forgent une conviction : « C’est pour aujourd’hui » ou « Non, il faut patienter encore une semaine ».
Il y a quelques années, dans un domaine réputé pour ses pratiques biodynamiques, une longue période pluvieuse menaçait les grappes d’un célèbre grand cru. Après des heures de débats, les équipes ont tranché : vendanger avant la fin des pluies, même si tout le monde s'accordait à dire que la maturité n'était pas optimale. Le résultat ? Un vin atypique mais marqué par une fraîcheur rare et séduisante. Comme quoi, la perfection est parfois une question de compromis réussi.
Si vous exploitez une parcelle en bio ou en biodynamie, voici quelques pistes pour ne pas vous tromper dans le choix de la date :
En viticulture biologique et biodynamique, choisir la bonne date des vendanges est un fascinant mélange de technique et de ressenti. Observer la vigne, comprendre son langage, et tenir compte de son environnement naturel sont des réflexes essentiels pour valoriser ces pratiques. C’est un art subtil, rythmé par des intempéries, des lunes et des hommes, mais quel plus beau défi que de magnifier ce précieux fruit de la nature ?